Une-Rose-sur-la-Lune

Pensées & réflexions en bataille.

Mardi 27 décembre 2011 à 2:19

Une heure et demie. 
 
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Le silence règne en maître depuis longtemps, il s'est installé avec l'obscurité. 
Nuit d'hiver, sans commencement ni fin, sans bruit ni mouvement qui viendrait éveiller les vivants. 
Sublime instant entre la vie et le reste. 

          Je n'arrive pas à dormir. J'écoute les Gnossiennes de Satie, et j'observe la profondeur du noir par la fenêtre. Quelques réverbères luttent vaillamment un peu plus loin, mais ils ne parviennent à éteindre la nuit. Les branches des arbres se tordent comme les mains d'une vieille dame, et leurs silhouettes inquiétantes ressortent, un peu plus sombres que l'obscurité. Pourtant qu'il est doux ce moment que rien ne vient troubler! Les minutes s'écoulent, lancinantes comme les notes de Satie. Je sens le sommeil s'emparer progressivement de chaque partie de mon corps, mais mon esprit refuse de m'endormir. Je veux profiter de cette nuit d'hiver, paisible, froide et silencieuse. En cet instant rien n'a d'importance; d'ailleurs, qui pourrait prouver que la vie continue? Dehors, pas un souffle, pas un mouvement. Dans les maisons, les hommes se taisent enfin. La nuit est hors de la course du temps. Elle est le rivage qu'attend tout marin exténué par la tempête. Tantôt inquiétant parce qu'inconnu, tantôt havre de paix. Ce soir elle est mon port d'attache, mon instant d'absolu. 


Mardi 8 novembre 2011 à 19:42

          Un jour, je suis entrée en classe de CP. J'avais la peur au ventre, celle qui fait trembler les mâchoires des enfants et qui mets des perles d'eau dans leurs yeux. La cour me paraissait trop grande, les élèves avaient l'air de sauvages, j'avais le sentiment de sombrer dans les abîmes d'une mer déchaînée.
          Des cris, partout. Ceux des enfants qui chahutaient, ceux des enfants qui se battaient. Ceux des surveillants qui disputaient et des maîtresses qui rassemblaient. Cette sonnerie stridente qui agressait les oreilles et qui me donnait envie de fuir.
           Et si j'étais mauvaise élève?

 
J'ai fermé les yeux.

Lorsque je les ai rouverts, j'avais dix-neuf ans, et toujours cette peur du monde qui vous agresse, et toujours celle de ne pas être capable.

 
La vie file, et nous restons les mêmes enfants perdus

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Dimanche 10 octobre 2010 à 15:14

 
 
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          Elle avançait, tremblante, sur la corde suspendue dans le vide. La sueur perlant à son front, elle tentait de se tenir droite malgré le mouvement traître du fil. Impossible de faire demi-tour, il était trop tard. Elle savait qu'elle jouait sa vie; elle l'avait toujours su. Le battement éperdu de son coeur lui rappelait à chaque pas qu'une erreur suffirait à la perdre. Un pied de travers, et elle sombrerait dans le vide abyssal qui s'étendait sous la corde.
          Pourtant elle ne regrettait rien. Jamais elle ne s'était sentie aussi vivante qu'aujourd'hui, perchée au-dessus du néant. Face à l'inconnu il ne lui restait plus qu'une certitude, la seule qui eut jamais compté: elle était animée, elle était vivante. Son sang parcourait ses veines, vibrant d'une nouvelle fureur de vivre, déchirant ses muscles endormis par une existence sans saveur. Son cerveau avait franchi les murailles de la raison humaine, il était bien au-delà: il ressuscitait. Enfin, après des années d'errance dans la boue du quotidien, elle saisissait le sens du mot "vie". Maintenant qu'elle ignorait ce que lui réserveraient les prochaines minutes, la flamme qui s'était éteinte au cours d'une existence trop paisible rugissait en elle. 
          Alors, sans ce soucier de la suite, elle posa son pied devant. Peu importait la mort. Aujourd'hui elle pouvait partir en disant ce que peu d'hommes pouvaient déclarer:
 
 
" J'ai vécu. "




 
 

Samedi 28 août 2010 à 18:50

 
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Lorsque je ferme les yeux, je revois la surface soyeuse de la Seine qui s'agite sous le ponton. Nous deux, assises dans la nuit, au bord de l'eau qui passe. Les lumières de la ville se reflètent sur l'eau, et il suffit de clore les paupières une nouvelle fois pour imaginer "les flambeaux des parisiens en colère" .
Toute cette Histoire qui se cache sous les ponts, au coin des rues, entre chaque pierre. Toutes ces vies qui ont piétiné les quais, tous ces hommes qui ont marqué de leur sceau la longue existence de cette ville ! A y penser j'ai le tournis.
Paris est une femme mystérieuse qui ne s'ouvre à nous que si elle le veut bien. Mais hier soir elle s'est découverte sous nos yeux ébahis, une fois de plus. 
 
Et lorsque je repasserai sur ce ponton je verrai les deux filles qui philosophent sur la vie à deux heures du matin, assises en tailleur sous l'immensité du ciel et le regard bienveillant de Paris. 
* * * 

L'amour s'en va comme cette eau courante,
            L'amour s'en va.
       Comme la vie est lente
Et comme l'Espérance est violente ! 
 
     Vienne la nuit sonne l'heure,
     Les jours s'en vont je demeure.
 
G. Apollinaire, Le Pont Mirabeau

* * * 

Vendredi 27 août 2010 à 14:13

Gare de l'Est. http://une-rose-sur-la-lune.cowblog.fr/images/Coeursdenfants.jpg Il y a les gens aux visages tristes et fermés comme une maison abandonnée, ceux qui regardent par terre pour ne pas risquer de rencontrer l'autre en cherchant dans ses yeux, ceux qui répondent à un sourire par une mine effarée. 
Le métro ouvre ses portes et refuse de repartir. J'attends et j'observe. J'entends des râlements et des soupirs agacés. Et puis là-bas, près de la sortie, je vois ces deux familles qui ne se connaissent pas. Avec deux petits garçons. Ils ont sûrement fait connaissance dans le métro, et maintenant que les parents les tirent vers la sortie en souriant, en voilà un qui s'exclame : 

 
" Si tu veux on peut être copains ! " 

On dirait un petit soleil, avec son ciré jaune et son grand sourire. 
L'autre lui tend la main. Marché conclu. 

 
 

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